Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Anicet Le Pors : « La loi de transformation de la fonction publique sape petit à petit le statut »

Publié le 26/05/2021 • Par Emeline Le Naour • dans : France, Toute l'actu RH           

entretien Valerio Vincenzo/Hanslucas.com

Invités par la Fédération syndicale unitaire (FSU) à l'occasion de la réédition de leur ouvrage de référence "La fonction publique du XXIe siècle", Anicet Le Pors et Gérard Aschieri sont revenus sur les conséquences de la réforme du statut des fonctionnaires sur le service public et sur l'ubérisation impulsée par Emmanuel Macron.

Dialogue social Fonction publique Fonction publique territoriale?

Parce que « les attaques contre le statut de la fonction publique se sont multipliées ces derniers mois » depuis l’entrée en application de la loi de transformation de la fonction publique, Anicet Le Pors et Gérard Aschieri ont estimé nécessaire de remettre à jour « La fonction publique du XXIe siècle »(1), cinq ans après sa première parution

Invité à prendre la parole lors d’un évènement en ligne organisé par le syndicat FSU, l’ancien ministre (PCF) de la Fonction publique et des Réformes administratives (1981-1984) de François Mitterrand et figure reconnue pour ses réflexions sur le service public, ne mâche pas ses mots à l’encontre de la politique menée par le gouvernement : « Avec la loi de transformation de la fonction publique et la réforme de la haute fonction publique, Emmanuel Macron veut obtenir un grand corps fongible dans lequel il puiserait pour répondre aux fonctionnalités de l’administration. On s’approche d’un spoils system »

« Depuis le début, Emmanuel Macron a adopté une stratégie claire. Il avait annoncé durant sa campagne que le statut des fonctionnaires n’était pas adapté et il a continué dans cette logique avec cette loi dont le but est d’introduire plus de contractualisation et de management dans le service public, le tout avec moins de contraintes », résume Anicet Le Pors qui voit dans la loi du 6 août non pas la volonté de supprimer purement et simplement le statut des fonctionnaires, mais bien « de le saper petit à petit ».

Démocratie en péril

« La politique d’Emmanuel Macron remet en cause la garantie collective d’un service public en la plaçant dans les mains des employeurs, qu’ils soient publics ou privés », dénonce quant à lui Gérard Aschieri, co-auteur de l’ouvrage, ancien secrétaire général de la FSU et ex-membre du Cese. Il tire la sonnette d’alarme : « Si le service public est menacé, c’est la démocratie qui est en péril ».

« Nous avions conçu ce livre comme un ouvrage qui devait durer dans le temps. Il s’agissait de mener un combat contre les préjugés taxant les fonctionnaires de privilégiés ou d’immobilisme. Nous voulions montrer en quoi ce statut correspond à la prise en charge de l’intérêt général et comment il permet l’effectivité des droits de chacun, et ce, partout », reprend Gérard Aschieri.

Il rappelle par ailleurs le poids chaque année plus important des contractuels dans les trois versants avec plus de 19% d’agents sous contrats, selon les derniers chiffres de la DGAFP. Parmi eux, 53% sont en CDD et 47 % en CDI.

Libéralisation du statut

« Désormais, on pratique le contrat individuel, négocié de gré à gré, on instaure la rupture conventionnelle et la rémunération au mérite. Il faut ajouter à cela l’introduction de la politique managériale et des lignes directrices de gestion qui affaiblissent la prise d’initiative, le recours massif aux contrats précaires et aux prestataires de services », énumère Anicet Le Pors. Des dispositifs qui installent peu à peu le principe d’une fonction publique d’emplois et non plus de carrières, s’inspirant ainsi du privé et son « agilité ». « Le statut donne un cadre au fonctionnaire, là où le contrat corsète l’agent ».

Face à ce déshabillage en règle, les deux auteurs opposent une vision optimiste : le XXIe siècle peut et doit être l’âge d’or du service public. Pour preuve, la crise a démontré que « ce sont bien les agents qui ont dû faire face, même en conditions dégradées ». « Un socle solide qui a fait montre d’initiatives » malgré des services dépourvus de moyens, conséquence de la rigueur budgétaire imposées ces dernières années au service public.

Tag(s) : #Actu, #nos droits, #cadres
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :